Initialement prévu pour les RTT uniquement, le don de congés s'est étendu à d'autres jours de repos mais également à d'autres bénéficiaires : parents d'un enfant malade ou handicapé, proche aidant (personne âgée, notamment), etc.
Mais concrètement, de quoi parle-t-on ? Quels salariés peuvent bénéficier du don de congés et dans quelles circonstances ? Quel est le rôle de l'employeur dans la démarche et quels bénéfices pour l'entreprise ?
Le don de congés, qu'est-ce que c'est ?
Le don de congés est issu de la loi "Mathys" de 2014, ainsi appelée en référence à un jeune garçon décédé d'un cancer en 2009. Pendant sa maladie, son père avait bénéficié d'un élan de générosité spontané de ses collègues de travail. Ces derniers lui avaient en effet donné, en dehors de tout cadre légal, 170 jours de RTT pour s'occuper de son fils.
Définition du don de congés
Le don de congés permet à un salarié de donner une partie de ses jours de repos non pris à un de ses collègues, dans certaines circonstances bien précises. Le bénéficiaire profite alors d’une rémunération normale pendant son absence, comme s'il s'agissait de ses propres congés payés.
Le don est anonyme et sans contrepartie pour le donateur.
Quels salariés peuvent en bénéficier ?
Initialement prévu pour le secteur privé, le dispositif s'est étendu à toute la fonction publique (décret du 28 mai 2015). Sont donc concernés :
- Les salariés des entreprises privées,
- L'ensemble des fonctionnaires : Fonction publique d'État / Fonction publique territoriale / Secteur hospitalier / Militaires.
Pour quelles circonstances ?
Don de jours de repos pour proche aidant
Il concerne le salarié qui vient en aide à un proche âgé et en perte d'autonomie ou un proche en situation de handicap avec une incapacité permanente d'au moins 80% (art. L3142-25-1) :
- Personne en couple avec le salarié (époux, épouse, partenaire de PACS, concubin et concubine).
- Ascendant, descendant, enfant à charge, ou collatéral jusqu'au 4ème degré : sœur, frère, neveu, nièce, tante, oncle, cousin germain... du salarié lui-même ou de son conjoint.
- Personne âgée ou handicapée avec qui le salarié entretient des liens étroits et stables, réside ou vient en aide de manière régulière et fréquente à titre non professionnel, pour des actes de la vie courante.
Le proche aidé doit séjourner en France de manière ininterrompue depuis plus de 3 mois.
Don de jours pour maladie ou décès d'un enfant
Le salarié peut en bénéficier s'il satisfait aux deux conditions cumulatives suivantes :
- Charge d'un enfant de moins de 20 ans,
- Cet enfant est atteint "d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité qui rendent indispensables une présente soutenue et des soins contraignants" (art.L1225-65-1 et L1225-65-2).
Depuis la loi du 8 juin 2020, le don de congés est également possible au bénéfice d'un salarié confronté au décès d'un enfant de moins de 25 ans (ou d'une personne à sa charge effective et permanente de moins de 25 ans).
Il s'agit de dispositions d'ordre public. Toute convention contraire est nulle et peut donner lieu au versement d'une indemnité au salarié concerné (art.L1225-70 et L1225-71).
Pour le personnel soignant
Il s'agit d'un dispositif temporaire mis en place par la loi du 20 juillet 2020 dans le cadre de l'épidémie du Covid-19.
Les salariés pouvaient donner des jours de repos au personnel soignant ayant travaillé entre le 12 mars et le 10 mai 2020. La date limite pour ce don était fixé au 31 octobre 2020. Ce dispositif n'est donc plus en vigueur aujourd'hui
Don de jours de congés pour le personnel réserviste
Certains salariés cumulent leur emploi avec un engagement à servir dans la réserve opérationnelle. Lorsqu'ils s'absentent de l'entreprise cette suspension de contrat entraine une absence de rémunération.
Pour éviter cette conséquence financière, la loi de programmation militaire du 15 juillet 2018 leur permet désormais de bénéficier de dons de jours de repos. Les modalités sont les mêmes que pour les autres cas : don anonyme, gratuit et portant sur des jours de congés spécifiques détaillés ci-après.
Quels jours de repos peut-on donner ?
Les salariés peuvent donner les jours suivants :
- RTT,
- Jours correspondant à la 5ème semaine de congés payés,
- Tout autre jour de récupération,
- Éventuels jours de congés supplémentaires prévus par la convention collective,
- Jours affectés à un compte épargne-temps (CET).
Par conséquent les seuls jours que le salarié ne peut pas donner sont ceux correspondant à ses 24 jours de congés ouvrables, soit 4 semaines, garantis par le droit communautaire.
Le rôle de l'employeur dans la démarche de don de congés
Une autorisation indispensable
Pour bénéficier du don, les salariés doivent en faire la demande auprès de leur service RH en fournissant un justificatif adapté. Par exemple pour la maladie d’un enfant : un certificat médical détaillé attestant de la gravité de son état et mentionnant qu'il nécessite "une présence soutenue et des soins contraignants".
De son côté, le donateur contacte également les ressources humaines pour informer de son souhait de donner une partie de ses congés à un collègue, en indiquant le nombre de jours concernés.
L'accord de l'employeur est ensuite impératif. Il peut librement accepter ou refuser le don.
La communication autour du don de congés
Cette possibilité de don de congés n'est pas forcément très connue des salariés. Or, son efficacité est conditionnée à un nombre conséquent de donateurs. De plus, ceux qui pourraient en bénéficier n'osent pas toujours en faire la demande.
Une bonne communication de l'employeur est donc indispensable, par exemple :
- Note d'information aux salariés sur le dispositif (à remettre avec le bulletin de paie, à distribuer, à afficher...),
- Mise en place d'une procédure à suivre pour bénéficier des jours ou pour en donner,
- Inclure les représentants du personnel dans la réflexion,
- Aborder le sujet directement avec les collaborateurs lors des entretiens annuels,
- Etc.
Une utilisation encore inégale selon les entreprises
Le principe s'est imposé assez largement dans les grands groupes. Ces derniers bénéficient en effet :
- D'un personnel RH suffisant pour gérer ces demandes,
- Un vivier de donateur important,
- Une stratégie RH et la volonté de se positionner sur des projets sociaux forts. Certaines entreprises ont intégré cette possibilité à leur stratégie et leur politique RH. Par exemple en organisant de véritables campagnes de communication interne pour sensibiliser et inciter les salariés à ce don.
Dans les autres entreprises et notamment les PME, le don de congés est davantage confidentiel. Même si elles adhérent au principe, leur principale réticence tient à la gestion administrative : traitement des demandes, vérification de la nature des congés donnés, mise à jour des compteurs de congés, comptabilisation, calcul du coût pour l'entreprise.
Heureusement, les solutions logicielles SIRH complètes proposent par défaut le transfert de congés d'un collaborateur à un autre et automatisent les mises à jour sans risque d'erreur. Ces solutions simplifient grandement la démarche et permettent une supervision facile par les RH.
Cette vision globale est utile. Elle permet en effet de lever une réticence éventuelle à la mise en place du don de congés, à savoir l'évaluation du coût pour l'entreprise. En effet, rappelons que l'entreprise maintient la rémunération du bénéficiaire pendant son absence. Or, le salaire de ce dernier est souvent différent de celui du donateur.
Le don de congés représente donc un coût pour l'employeur lorsque le donateur perçoit une rémunération inférieure au salarié bénéficiaire. Avec une vision exhaustive du dispositif, on peut ainsi mesurer l'équilibre général des différents dons pour l'organisation.
Néanmoins, les bénéfices pour l'entreprise sont indéniables et sa mise en place est une réelle avancée sociale.
Les bénéfices pour l'entreprise du don de congés
Encourager l'esprit d'équipe, la solidarité et la cohésion
Le don de congés repose sur un principe de solidarité qui est souvent très bien compris et partagé par les salariés. Par exemple, les campagnes de communications menées en interne par le CNRS ont permis de collecter plus de 2400 jours par an sur les années 2016 et 2017 (source : témoignage du CNRS sur le don de congés).
La participation des salariés à un tel projet commun et rassembleur, permet de développer la cohésion et l'esprit d'équipe. Pour le personnel, l'entreprise n'est plus seulement un lieu de travail mais également une communauté porteuse de sens, dans laquelle il souhaite s'investir.
L'entreprise renvoie également l'image d'une structure ouverte, soucieuse et proche de ses employés.
Éviter la perte des congés non pris
Un autre bénéfice très concret pour l’entreprise : une meilleure gestion des congés payés, en particulier les congés non pris en fin de période.
En effet, les salariés doivent solder leurs congés au 31 mai de chaque année. À défaut ils sont perdus, sauf cas particuliers (autorisation de report de l'employeur notamment). Dans le même temps, des salariés de l'entreprise sont peut-être contraints de prendre des congés sans solde pour accompagner un enfant ou un proche.
Le don de congés apparait donc comme une solution idéale et solidaire. Des collaborateurs se sentant démunis face aux difficultés de l'un des leurs peuvent ainsi agir concrètement pour leur collègue.
En outre, pour l'organisation, le don de congés permet à un salarié motivé de travailler à la place d'un autre peut-être moins impliqué en raison des difficultés qu'il rencontre dans sa vie personnelle.
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