La protection sociale complémentaire bénéficie d’exonérations sociales et fiscales à la condition de présenter un caractère collectif, soit pour l’ensemble des salariés de l’entreprise, soit pour plusieurs catégories objectives de salariés. Un décret du 31 juillet 2021 a actualisé la notion de catégories objectives pour la protection sociale complémentaire qui prendra effet au 1er janvier 2022.
Mais que comprend la protection sociale complémentaire ? Qu’entend-on par catégories objectives ? Quelles sont les modifications suite au décret du 31 juillet 2021 ? Nous vous proposons dans cet article un éclairage sur les critères des catégories objectives au 1er janvier 2022.
Qu’est-ce que la protection sociale complémentaire ?
La protection sociale complémentaire comprend d’une part la retraite supplémentaire qui offre une garantie supplémentaire au régime de retraite obligatoire (Sécurité Sociale et retraite complémentaire AGIRC/ARRCO), et d’autre part la prévoyance complémentaire offrant une garantie complémentaire aux prestations de Sécurité Sociale (IJSS, pension d’invalidité, remboursement frais de santé, …).
La prévoyance complémentaire comprend deux régimes distincts : la prévoyance « frais de santé » et la prévoyance « décès, incapacité, invalidité ».
Que comprend la protection sociale complémentaire ?
On peut distinguer 3 régimes de protection sociale complémentaire des salariés :
- La prévoyance « frais de santé » plus communément appelée mutuelle : elle est obligatoire pour tous les employeurs.
- La prévoyance « décès, incapacité, invalidité » : elle est facultative sauf pour la couverture décès des cadres, et peut être imposée par un accord de branche étendu (convention collective).
- La retraite supplémentaire : elle est également facultative, comme pour la prévoyance, elle peut être imposée par un accord de branche.
Les conditions pour bénéficier des exonérations sociales et fiscales
Les cotisations patronales de retraite supplémentaire et de prévoyance complémentaire sont exonérées de charges sociales ainsi que d’impôt sur le revenu (sauf pour les cotisations patronales de frais de santé qui sont dans tous les cas soumis à l’impôt sur le revenu).
Plusieurs conditions doivent être réunies pour pouvoir bénéficier des exonérations :
- Caractère obligatoire : l’adhésion au régime par les salariés doit être obligatoire lorsque l’entreprise met en place un régime de protection sociale. Il existe des cas de dispense d’affiliation. Le bénéfice du régime doit être maintenu en cas de suspension du contrat de travail indemnisée au moins en partie par l’employeur (arrêt de travail, congé maternité, …).
- Caractère collectif : le régime doit concerner la totalité des salariés de l’entreprise ou une partie des salariés définie en fonction de catégories objectives de salariés dont seuls certains critères sont admis. La contribution patronale doit être uniforme pour tous les salariés ou pour tous ceux d’une catégorie.
Le caractère collectif des régimes de protection sociale complémentaire : la notion de catégories objectives
Le caractère collectif n’est pas remis en cause si les régimes de protection sociale complémentaire sont distincts entre différentes catégories de salariés définis selon plusieurs critères, c’est ce que l'on appelle les catégories objectives. Ces catégories peuvent être définies selon 5 critères.
1. La distinction cadre/non cadre
Le premier critère le plus couramment utilisé est d’offrir une garantie différente aux cadres et aux non-cadres.
La catégorie cadre est constituée principalement des ingénieurs et cadres ainsi que des salariés dont l’emploi est assimilé aux cadres. La notion de catégorie « cadre » a été actualisée dans un décret du 30 juillet 2021 afin d’adapter cette catégorie à la fusion AGIRC/ARRCO intervenue au 1er janvier 2019.
À noter que les cadres dirigeants ne peuvent en eux seuls constituer une catégorie objective au regard du 1er critère.
Ainsi, la catégorie non-cadre constitue les autres salariés de l’entreprise qui n’entrent pas dans la catégorie « cadre ».
En dehors de ces deux catégories, il n’est pas possible d’exclure une catégorie de salarié en raison de sa qualification dans l’entreprise.
2. Catégorie en fonction d’un seuil de rémunération
Ce deuxième critère permet de définir des catégories objectives en fonction de la tranche de rémunération brute soumise à cotisations des salariés sur la base du plafond de la Sécurité Sociale (PSS). Seules deux catégories peuvent être constituées en fonction d’une tranche de rémunération.
Les seuils de rémunération admis sont les suivants :
- 1 PSS
- 2 PSS
- 3 PSS
- 4 PSS
- 8 PSS
Toutefois une catégorie ne peut être définie que sur le seul critère d’une rémunération supérieure à 8 PSS.
3. Les catégories des conventions collectives
Les classifications professionnelles mentionnées dans les accords ou conventions de branche peuvent définir une catégorie objective même si elles sont différentes du clivage légal « cadre/non cadre » correspondant au critère 1.
4. Les sous catégories des conventions collectives
Les catégories objectives peuvent également être définies par les sous-catégories définies par les conventions collectives en fonction d’un niveau de responsabilité, d’un type de fonction, d’un degré d’autonomie ou à l’ancienneté dans le travail. La définition de ces critères doit être objective pour être retenue en tant que catégorie objective.
5. Les usages dans la profession
Une catégorie objective peut être définie en fonction des usages constants, généraux et fixes en vigueur dans la profession. L’employeur doit être en mesure de justifier la notion de couverture collective de chaque catégorie de salariés.
À noter que des exceptions sont tolérées par l’administration, il appartient alors à l’employeur de justifier la couverture collective des salariés placés dans la même situation. Il s’agit notamment :
- Des salariés détachés à l’étranger.
- Des VRP sous certaines conditions.
- Des travailleurs à domicile sous certaines conditions.
- Des assurés d’un régime spécial légal ou réglementaire obligatoire (Alsace Moselle, régimes spéciaux de Sécurité Sociale, …) couvrant les mêmes risques que la couverture proposée par l’entreprise.
Les catégories objectives au 1er janvier 2022
À la suite de la publication du décret 2021-1002 du 30 juillet 2021, deux critères de catégories objectives ont été actualisés pour prendre en compte la nouvelle réglementation AGIRC/ARRCO.
Les catégories cadres et non cadres actualisées
Jusque-là, la notion de catégories « cadres » et « non cadres » faisait référence aux anciens accords ARRCO et AGIRC qui ont été abrogés suite à la mise en place du régime unifié AGIRC/ARRCO au 1er janvier 2019. La catégorie « cadre » correspondait aux cadres « art4 », « art 4 bis » et « art 36 ».
Les catégories de « cadres » et de « non-cadres » font désormais référence aux articles 2.1 et 2.2 de l’accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017 soit les ingénieurs et cadres dits « art 4 » ainsi que les employés, techniciens et agents de maitrise assimilés à des cadres dits « art 4 bis ».
Ce décret offre également la possibilité aux employeurs de rattacher à la catégorie « cadre » les salariés définis par accord interprofessionnel ou professionnel ou convention de branche à cette catégorie. Ceci concerne les salariés cadres qui n’entreraient pas dans la catégorie « art 4 » ou « art 4 bis » et notamment les cadres « art 36 » qui ne sont pas mentionnés dans l’ANI du 17 novembre 2017. A noter que l’accord ou la convention doit être agréé par la commission paritaire rattachée à l’APEC.
En pratique, il s’agit plus d’une actualisation des textes légaux qu’un changement radical dans la définition des catégories objectives. Ainsi, il n’y a aucun changement pour la plupart des salariés cadres soit les « art 4 » et « art 4 bis ». En l’espèce, seuls les salariés cadres qui n’entreraient pas dans ces deux catégories et pour lesquelles aucun accord ou convention de branche ne prévoit un rattachement à la catégorie cadre sont concernés par cette évolution et doivent désormais être affectés à la catégorie « non-cadre ».
Actualisation du seuil de rémunération
Il s’agit là aussi d’une actualisation des textes de référence définissant les seuils de rémunération suite à la mise en place du régime unifié AGIRC/ARRCO. Ainsi, la référence à la convention nationale de retraite et prévoyance des cadres est remplacée par l’ANI du 17 novembre 2017 relatif à la prévoyance des cadres. En l’espèce, les différents seuils de rémunération demeurent les mêmes qu’avant, soit 1, 2, 3, 4 ou 8 fois le plafond.
Entrée en vigueur le 1er janvier 2022, mais tolérance jusqu’à la fin 2024
Le décret entre en vigueur 6 mois après sa publication soit le 1er janvier 2022, mais avec une période transitoire jusqu’au 31 décembre 2024 afin de laisser aux différents acteurs (organismes de protection sociale et employeurs) le temps de se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation.
Il s’agit principalement de mettre à jour les différents contrats de protection sociale complémentaire afin d’actualiser les textes de référence dans la définition des catégories objectives et de vérifier que les salariés soient bien affectés à la bonne catégorie, faute de quoi l’employeur peut perdre le bénéfice des exonérations fiscales et sociales.
Avec les critères des catégories objectives qui évoluent au 1er janvier 2022, il n'est pas toujours simple de s'y retrouver. Nous vous accompagnons dans la gestion et l'administration de votre personnel grâce à notre logiciel de Gestion des Ressources Humaines Kelio.